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Le passage des Allemands au Poursollet fut un tragédie, des jeunes résistants surpris et fusillés, des chalets incendiés, des animaux réquisitionnés.
Pour Annie, ce fut un épisode terrifiant et l'immense chagrin de voir son âne s'éloigner à jamais avec les troupes allemandes. Les mois passèrent. Le jour tant attendu arriva enfin où les Allemands quittèrent la place : la débâcle. Ils chargèrent le matériel en toute hâte sur les chevaux et les ânes et s'engagèrent dans le long défilé de la Romanche. L'âne d'Annie fit partie du cortège, bâté et chargé, il avançait sous les cris et les menaces des vaincus, dans la précipitation de leur fuite. Au cours de la traversée de Livet, il reconnut sa maison. Son instinct d'âne se réveilla : il plaqua les deux sabots de ses pattes avant sur les marches du seuil, et s'immobilisa. Ni les coups de bâton, ni les hurlements ne purent l'ébranler. L'Allemand dut se résoudre à lui retirer son chargement pour pouvoir poursuivre sa route, et à l'abandonner sur place. Quelle stupéfaction ce fut pour toute la famille Achard de retrouver ce cher résistant têtu qu'on croyait disparu ! Le retour du guerrier fut inoubliable pour Annie. |