Un mystérieux bloc composite rectangulaire
à Serre d'Outre Lors de l'élargissement de la route actuelle, en 2016, les entrepreneurs ont dû raccorder les chemins desservant les terres riveraines. Au lieu-dit Peroche, entre le Serre d'Outre et le ruisseau des Sillonnières, à l'entrée nord du village, ces travaux ont mis à jour, dans le talus amont du chemin de la parcelle dominant la route, une forme claire rectangulaire qui intrigue fort les Orichons. C'est une sorte de bloc composite tranché à vif d'environ 3 m de long sur 60 cm de haut, trop géométrique pour être naturel, ce n'est pas une roche dure, mais une sorte de chaux en délitescence, comme une fosse qui aurait été remplie. Les géologues et archéologues locaux s'interrogent.
Au niveau supérieur de ce mystérieux rectangle, on remarque un alignement de pierres se prolongeant de chaque côté. Retrouvons-nous ici les restes de l'empierrement d'une ancienne route ? Les témoignages signalent que l'ancienne route d'Oris passait derrière la première maison du village actuel, (maison d'Albert Moisand) et rejoignait ici le tracé de la route actuelle au lieu-dit Peroche.
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* Peroche : difficile de savoir s'il s'agit ici de Perroche, Peroche ou Paroche, la tradition orale hésitant toujours entre un patois et un français " écorchés ".
En toponymie, Peroche, Perroche indiqueraient un lieu pierreux, rocheux, alors que Paroche, Parroche évoqueraient plutôt le mot paroisse. Les deux étymologies pourraient correspondre, mais rien n'est prouvé. Les Rines (en aval de Peroche) est un toponyme très répandu dans la vallée, il évoque les lieux recouverts de pierres et de boue par les crues torrentielles. Oris serait-il le 3e village ?
Nous connaissons tous à Oris la jolie petite maison de Chabert d'Ava, dernier vestige du village détruit en 1688. Au lieu-dit l'Echarna, un glissement de terrain l'entraîna dans sa chute avec l'église et le cimetière dans le ravin de la Tessonnière, comme en témoignent les visites épiscopales de Mgr Le Camus.
La tradition orale rapporte qu'un autre village d'Oris aurait été enseveli sous un glissement de terrain, au lieu-dit Peroche*. Des traces de murets ont été mises à jour lors de terrassements. Ce village aurait été desservi par cette ancienne route (en pointillé sur la vue aérienne). Comme les anciens Orichons de Peroche, ici, des ruches profitent aujourd'hui de la bonne exposition du midi, à l'abri de la Roche d'Oris. Pas folle l'abeille ! Mais rien n'explique la présence, ni la nature, de cette forme rectangulaire. Que cherche-t-elle à nous révéler ? |
A la sortie d’Oris en Rattier sur la D114a en direction de la Basse Valette, un élargissement de la route a été effectué. Deux traces blanchâtres ont été mises à jour dans la butte bordant la route. Les deux traces visibles sont de forme rectangulaire (0,60 m x 3 m). La première hypothèse émise en examinant les anciens cadastres serait que nous sommes en présence de l’ancienne route d’Oris en Rattier.
Lors d’une visite sur le site nous avons pu examiner ces deux traces. Celles-ci sont en fait de la chaux. En examinant plus précisément ces restes, nous avons pu aussi trouver des traces de charbon de bois mélangées dans les restes. En effectuant des prélèvements nous avons pu trouver de la pierre calcaire non totalement cuite, de la pierre cuite, de la terre rouge (la couleur étant due à une exposition à une intense chaleur). |
L’ensemble de ces éléments permet d’émettre l’hypothèse suivante : nous avons à faire à deux zones de fabrication traditionnelle de chaux.
Pourquoi une zone de production de chaux à cet endroit ? Deux éléments sont nécessaires : la présence de calcaire et le besoin de chaux pour construire des bâtiments. Dans la zone concernée la pierre calcaire est disponible. La toponymie de la zone laisse à penser que des habitations étaient présentes autour de cet endroit. Sur la parcelle cadastrale 913, en discutant avec la personne qui habite la maison voisine, celui-ci nous a fait part de la présence de vestiges d’un bâtiment. Celui-ci fut mis à jour lors de la construction d’un garage, le décaissement du terrain a mis au jour des fondations. Aujourd’hui ces vestiges ne sont plus visibles. |
La production artisanale de chaux remonte à l’Age du Bronze. La production industrielle de chaux nécessite la construction de fours comme on peut en voir au Pont du Prêtre. Pour une fabrication artisanale de chaux, il n’est pas nécessaire d’avoir un four. Celui-ci était construit à même le sol pour un usage unique.
1- Pour cela, on choisissait un terrain à forte déclivité afin d’éviter la construction d’un mur. 2- 3- On creusait un trou en le divisant en deux parties, cette division étant matérialisée par une saillie afin de pouvoir faire reposer dessus la voûte de pierre à cuire. Cette partie étant la partie supérieure du four elle est enduite d’argile pour conserver au mieux la chaleur. 4- La partie inférieure qui servait au foyer débouchait au jour afin de pouvoir alimenter le feu. 5- Le chaufournier commençait par construire la voûte en pierre calcaire reposant sur la saillie. Les pierres sont posées en équilibre sans liant. 6- Une fois cette étape faite on remplissait couche par couche (en premier de la pierre à cuire ensuite une couche de charbon de bois puis une autre couche de pierre et ainsi de suite). 7- Il est important de laisser l’air et les flammes passer au travers de l’empilement afin que la chaleur diffuse correctement. La dernière couche était faite en pierre et formait un renflement au-dessus afin de conserver la chaleur dans le four. La source de chaleur était fournie par des fagots de bois secs. Il fallait entretenir le feu pendant trois jours et trois nuits afin de maintenir la température du four autour de 1 000°. 8- La réaction chimique par calcination transforme alors le calcaire CaCO3 en chaux vive CaO avec dégagement de gaz carbonique CO2. 9- A la fin de la cuisson les pierres sont alors retirées du four. Un tri étant effectué pour écarter les pierres mal cuites. Les pierres cuites sont alors stockées à l’abri de l’air, afin d’éviter le phénomène de carbonatation, ce qui aurait pour effet de modifier les qualités de liant de la chaux. Stéphane Revel |
La chaux produite est de la chaux vive qu’il faut éteindre avec de l’eau. On la trempe alors avec la moitié de son poids en eau, ceci a pour effet un très fort dégagement de chaleur et une désintégration de la pierre en poudre, on obtient ainsi de la chaux éteinte CaO+H2O=Ca(OH)². La chaux devait être conservée dans des récipients au sec avant son utilisation. Quand les archives viennent confirmer les hypothèses Marthe David a retrouvé le vieux livre de comptes de Rémi Moisand dans les archives familiales, et deux pages de ce livre font état de ventes de chaux fabriquée à Serre d'Outre. |