L’école et le catéchisme:
Je suis né au Désert de La Morte le 23 novembre 1939 ainsi que mon père et ses parents. La famille Perret, parents de ma mère, est de « belle lauze », lieu-dit situé à mi-chemin entre La Morte et St Barthélémy-de-Séchilienne. Dans les années trente, à La Morte, comme partout à la montagne, les femmes accouchent le plus souvent chez elles. En plus la route du Désert, pas déneigée, ne facilite pas le transport de la femme enceinte, ni celui du médecin ou de la sage-femme. Ce n’est pas facile non plus pour aller à l’école, celle-ci est à 2 km et le trajet se fait à pied ou à ski l’hiver. Les jours de mauvais temps un adulte nous accompagne. Notre repas de midi est emporté et déposé à la ferme à côté de l’école au lieu dit « le Couvent ». Nos chaussures, des galoches, sont composées d’une semelle en bois clouté avec le dessus en cuir, elles servent de chaussures de marche mais aussi de chaussures de ski. Elles sont fabriquées par nos parents. Les skis, souvent en frêne, sont munis d’une monture permettant de tenir le pied. Cette monture est composée, de chaque côté de l’avant du pied, de deux étriers en fer surmontés d’une lanière de cuir permettant de tenir la chaussure. Cette dernière est maintenue vers l’avant par deux lanières de cuir réglables reliées à un ressort avec un fermoir que l’on rabat vers l’avant. Les bâtons et les rondelles sont en bois. |
Embarquement des troupeaux à la gare de Jarrie : Vers deux heures du matin, nous nous mettons en route en direction de la gare de Jarrie pour arriver avant qu’il n’y ait trop de circulation sur la route. Nous sommes toujours quatre, celui qui est à l’arrière du troupeau a le travail le plus important car il doit être très vigilant et surveiller les voitures qui arrivent et leur signaler notre présence en faisant des signes avec une lampe. Nous devons également surveiller qu’un ou plusieurs moutons ne s’échappent pas dans un champ bordant la route, ou ne tombe dans un regard d’eau pluviale car à l’époque il n’y avait pas de grille de protection. Quand nous arrivons à la gare de Jarrie, le jour s’est déjà levé et nous regroupons les moutons le long du quai où sont alignés les wagons. Le quai est à hauteur des wagons, nous mettons quand même un petit pont entre le quai et le wagon pour que les moutons ne risquent pas de blesser leurs pattes en montant. Le convoi est plus long que le quai ; en dehors du quai, le sol étant beaucoup plus bas, nous devons mettre un « pont » muni de roulettes pour monter dans le wagon. Ce pont étant très en pente, les bêtes montent plus difficilement, le chargement est donc plus lent. Le dernier wagon est réservé aux ânes, aux chiens, et aux bergers. Il faut impérativement que tout soit prêt pour midi car c’est l’heure du départ du train pour St Martin-de-Crau. Le trajet : Tout au long du trajet, il y a des arrêts car d’autres wagons sont accrochés au train. Ces arrêts provoquent des « coups de tampons » c'est-à-dire des chocs qui peuvent faire tomber les moutons à l’intérieur des wagons, nous devons le vérifier rapidement et relever les moutons tombés pour qu’ils ne se fassent pas piétiner ou étouffer par les autres. |
Monsieur Gauthier arrive à convaincre mon père d’acheter un tracteur pour sortir ce charbon de bois de la forêt, mais celui-ci n’a pas d’argent et ne peut pas acheter l’engin. M. Gauthier lui fait alors une avance pour qu’il puisse faire un crédit et acheter un « Vandeuvre », tracteur de vingt chevaux et avec deux roues motrices.
Au printemps 1955, trois familles construisent une baraque en bois dans la forêt et s’y installent. Les hommes repèrent des endroits relativement plats pour pouvoir approcher les bois coupés des futures plates-formes où seront situées les « charbonnières (1) » qui serviront à brûler le bois. Les bûcherons se mettent au travail, certains commencent à couper les hêtres pendant que d’autres construisent à la pelle et à la pioche les plates formes, celles-ci font trois mètres de diamètre. |