Yvette Félix
par Chantal Ruchier Berquet La bibliothèque de Lavaldens
Yvette et moi, nous nous retrouvions au bibliobus garé en face de la salle polyvalente. Elle, organisée, posée, et moi enthousiaste, mais toutes les deux déterminées : il nous fallait une bibliothèque. La création. Nous présentons notre projet à M. Smout, maire de Lavaldens, il lui plaît et plaît à l’équipe municipale. Rendez-vous chez Yvette. Au départ, la bibliothèque dépend de Roizonne Avenir, mais nous avons une comptabilité indépendante gérée par notre trésorière Christine Félix et supervisée par Yvette. L’équipe de la Bibliothèque Départementale nous aide : subventions, choix des livres. Toutes les trois, nous suivons une formation de 6 journées à Grenoble, les lundis. La municipalité de Lavaldens nous attribue un local au-dessus du secrétariat de mairie. Rénovation, équipement, couverture des livres, inventaire manuel, tout s’organise. Yvette prend les décisions : posée, calme, elle sait à qui parler, et comment parler aux personnes compétentes. L’inauguration a lieu avec discours, tout se met en place et la bibliothèque est tout de suite bienvenue par les habitants de Lavaldens, Oris, La Valette et La Morte dont les municipalités nous accordent aussi une subvention. Chaque année nous allions acheter pour 500 à 800 € de livres chez Arthaud à Grenoble qui nous livrait dans la semaine. Une matinée entière à choisir (sans payer), quel régal ! Yvette s’intéressait surtout au terroir, à une littérature plus classique et moi plus fantaisiste, mais jamais elle ne discutait mes choix avec une grande tolérance. Ce fonds était enrichi par des échanges de livres avec le bibliobus. Hélas, les aléas de la vie nous ont beaucoup affectées mais nous étions des amies sincères et attentionnées, et nous avons continué. Nouvelle étape, l’arrivée de l’informatique. Yvette est contrariée, mais elle assure. De temps en temps, elle vient avec ses petits enfants et leur apprend à lire avec patience. C’est beau ces petits, appuyés contre leur mémée et qui s’appliquent, mais par contre, ils l’aident sur l’ordinateur. Chantal Ruchier Berquet Le déménagement. La bibliothèque s'installe dans une salle toute neuve au rez de chaussée, dans le préau de l'ancienne école d'Yvette. Puis le relai est assuré par Marie-Agnès. La bibliothèque est intégrée au réseau de la Communauté de Communes : La Matacena et prend le nom de "La soif de lire" . C’est encore une autre époque. |
Yvette choriste
par Evelyne Scalliet Yvette fait partie de l'équipe pionnière qui a donné naissance à la chorale de la Roizonne. Discrète malgré sa notoriété et assidue, elle a adopté et soutenu le pupitre des altis.
Quand notre collaboration avec les chorales « Triolet » et « Coro italiano » s'est concrétisée, l'apprentissage de certains chants italiens comme : « Vivo per lei », « Va pensiero », « O bella ciao » est devenu nécessaire..., heureusement Yvette, bilingue, est venue à notre secours pour leur donner un sens, et nous enseigner patiemment leur prononciation ….. Aimant particulièrement les chants de Noël, elle a fini par dépasser sa timidité , en chantant en duo avec Paulette Perret le célèbre « Minuit Chrétien » auquel elle a su donner toute sa solennité. Ayant le sens de l'hospitalité, elle nous a accueillis chez elle lors de nos répétitions acharnées du Gloria de Vivaldi, chaque pupitre ayant besoin d'une pièce pour l'apprentissage de sa voix enregistrée sur CD. Après l'effort, elle assurait notre réconfort autour d'une boisson chaude et de délicieux petits gâteaux..... Une grande dame et une grandeur d'âme... Le Scrabble
par Chantal Ruchier Berquet Le scrabble est le pilier de nos vendredis après-midi : Yvette connaissait tant de mots ! Les règles de grammaire ! Les exceptions ! Elle réagissait à nos blagues sur certains mots par un sourire fin. Yvette Félix avait de l’élégance et beaucoup de culture. Jamais critique, jamais dans de jugement. C’était une personne modeste et exceptionnelle. |
Paul Félix
par Bernard Tourtet Paul était un formidable raconteur d'histoires vécues et, dans les années 90, c'était le "chroniqueur chantant" de France Bleu Isère à... 6h30 du matin. Il avait un répertoire étonnant et immense de chansons traditionnelles françaises, un raconteur d'histoires, avec sa voix douce.
Paul a vécu toute sa vie à Lavaldens : on ne le sait pas trop dans la vallée mais il avait participé aux secours organisés sur l'Obiou lorsque l'avion canadien s'est craché en 1950, cela l'avait marqué durablement. Agriculteur de haute montagne ses terrains à cultiver étaient (et restent) très pentus, il fut l'un des premiers à acheter une moto-faucheuse pour faire les foins, ensuite je le vois encore faire glisser ses balles de foin en jute qu'il venait récupérer en tracteur le long de la route du Pay, Paul c'était aussi une immense histoire d'amour avec ses chèvres, combien de fois l'ai-je entendu les appeler à la nuit noire, parties un peu trop loin dans les vallons du torrent de Parier, Son chant d'appel était magnifique à entendre, répercuté souvent comme un écho dans les nuits d'été. Sa ferme est installée au hameau de la Haute Gorge, Ses fromages de chèvres étaient réputés sur Grenoble et ornaient les tables des meilleurs restaurateurs. Déjà le circuit court avant l'heure ! Il avait arrêté son activité seulement en 2015. Paul était comme on aimait à se le dire par dessus la barrière du jardin mon "voisin de palier", Ce fut le premier habitant à m'accueillir le 20 août 1978 lorsque je suis arrivé sur Lavaldens. On s'est croisés tous les jours pendant 32 ans, lui montant à sa ferme, et moi partant sur Grenoble. Juste un petit coup de klaxon à 5h30 du matin pour se souhaiter une bonne journée et réveiller les voisins ! ! Voilà c'était Paul, décédé le mardi 20 février 2018 à 88 ans et cela me fait tout drôle de parler de lui au passé, ainsi va la vie. (B. T.) |
Café patrimoine sur le patois
Paul Félix avait retrouvé tous les accents du patois de Lavaldens lors de ce mémorable café patrimoine qui avait réuni les derniers patoisants de la vallée.
Les anecdotes de jeunesse, en français et en patois avaient la saveur du terroir, la fraîcheur de l'authentique. L'échange en patois avec Odette Cros, Janine Poligny, René Mistral, Denise Duboulet, Gilbert Vigne, timide au début car chacun croit avoir tout oublié, s'est vite animé des divers accents des patois de la vallée, car attention : le patois n'est pas le même d'un village à l'autre, mais on se comprend.... Paul, affecté par les deuils qui avaient frappé sa famille, avait perdu le goût de chanter depuis plusieurs années, mais sous notre insistance, il avait retrouvé quelques refrains familiers et le naturel l'avait emporté et entraîné avec lui la joie de toute l'assistance. Ce 3 mai 2016 restera le meilleur souvenir des cafés patrimoine d'Oris. |